Le patient expert désigne celui qui, atteint d’une maladie chronique, a développé au fil du temps une connaissance fine de sa maladie et a appris à vivre avec. Le patient expert est avant tout acteur de sa propre santé mais il peut aussi intervenir en tant que personne ressource pour les autres.
Etre acteur de sa propre santé
L’évolution du contexte épidémiologique en France conduit depuis quelques années les politiques publiques, les professionnels de santé et les patients à trouver des solutions pour la gestion de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques (diabète, polyarthrite rhumatoïde, asthme, maladies inflammatoires chroniques intestinales…).
Sortant peu à peu d’une relation paternaliste entre le médecin et son patient, on accorde une place de plus en plus prépondérante au patient, en témoignent notamment la loi « Hôpital, Patient, Santé et Territoire » (HSPT) de 2009, qui pose entre autres les cadres de l’éducation thérapeutique du patient ou bien encore les textes de loi qui définissent le droit à l’information du patient .
Les pratiques médicales évoluent donc et les médecins ne travaillent plus aujourd’hui seulement pour le patient mais réellement avec le patient. Par ailleurs, le formidable essor des TIC (Technologies d’Information et de Communication) dans le secteur de la santé conduit inévitablement chacun d’entre nous, lorsqu’il est confronté à la maladie, à aller chercher de l’information et du soutien sur Internet et sur les réseaux sociaux communautaires, nous offrant ainsi la possibilité d’engager un véritable dialogue avec les professionnels de santé. La place du patient est donc au cœur de notre système de santé actuel.
Expertise scientifique et expertise profane : un partenariat
Selon le professeur André Grimaldi, chef du service de diabétologie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, l’expert scientifique désigne le savant, la personne ressource que l’on consulte pour trouver des solutions à la maladie. Mais le problème est que bien souvent, les médecins sont effectivement experts dans le traitement de telle ou telle maladie, tout en étant loin d’être experts en psychologie, en sociologie ou en santé publique. D’où, selon lui, l’apparition du concept d’expert profane, de patient expert.
Le patient expert est avant tout expert de lui-même et de sa propre maladie. Il faut bien reconnaître que le patient souffrant d’une maladie chronique a développé des compétences, grâce à l’éducation thérapeutique parfois, à l’expérience toujours. Parfois d’ailleurs, les patients sont de meilleures sources d’information sur les aspects pratiques de la gestion de la maladie au quotidien que les médecins eux-mêmes !
La nécessité d’établir un partenariat entre les professionnels de santé, les patients experts et les patients que l’on pourrait qualifier de « novices » ou du moins en difficulté devient alors une évidence. C’est la raison pour laquelle le patient expert est à la fois un patient ressource, une sorte de médiateur de la relation patient/soignant mais aussi un patient expert polyvalent pour les autres.
La formation des patients experts
En 2009, Catherine Tourette-Turgis, enseignante en médecine à l’université Pierre et Marie Curie a ouvert la première Université des Patients, qui propose aux personnes souffrant d’une maladie chronique et aux aidants toute une palette de formations en éducation thérapeutique ou accompagnement.
Du DU (diplôme universitaire) au Master, ce sont des formations diplômantes ou certifiantes que propose l’université de patients aux malades chroniques, afin de former des patients experts sur les maladies chroniques et sur l’éducation thérapeutique.
En plus du savoir acquis et validé, l’Université des Patients joue auprès des malades chroniques un rôle social, en permettant à un public bien souvent exclu de l’offre de formation continue de se reconstruire socialement et professionnellement à travers un véritable métier.
Vers une reconnaissance professionnelle et institutionnelle ?
Via la formation des patients experts et le développement de programmes d’éducation thérapeutique dans les établissements de santé, ces patients ressources deviennent parfois des professionnels à part entière.
Par exemple, les hôpitaux de Saint Maurice, dans le Val-de-Marne, participent au projet européen de recherche EMILIA (Empowerment of Mental Illness service users through-Life-long Learning Integration and Ation), dont l’objectif est la réinsertion de personnes atteintes de troubles psychiques. Les hôpitaux Saint Maurice ont dans ce cadre-là recruté deux patients experts qui sont pleinement intégrés, sous contrat, à l’équipe soignante.
Pour l’instant, il n’existe pas de reconnaissance institutionnelle du statut de patient expert en établissement de santé. Il conviendrait pourtant de définir précisément dans un avenir proche les missions et les champs d’intervention de ces nouveaux « professionnels de santé ».
Sources
– Les tribunes de la Santé, n°27 (http://www.cairn.info/revue-les-tribunes-de-la-sante-2010-2-page-91.htm)
– Le patient-expert dans les établissements de santé, Banque de données en santé publique, École des Hautes Études en Santé Publique (http://www.bdsp.ehesp.fr/Base/469505/)
– http://www.universitedespatients.eu/
– Développement Professionnel et continu, Mai 2011, HAS (http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1046921/fr/dpc-pratiques-n-55)
– La révolution des patients experts : devenir acteur de sa santé, Emission Le téléphone sonne du mercredi 5 novembre 2014, France Inter (http://www.franceinter.fr/emission-le-telephone-sonne-la-revolution-des-patients-experts-devenir-acteur-de-sa-sante)